Le 16/09/2016
Les Editions
Francis Lefebvre ont sélectionné pour vous les arrêts les plus marquants rendus
cette semaine par la Cour de cassation, qui a repris son activité à l'issue des
vacances judiciaires, ainsi que plusieurs décisions récentes de cours d'appel.
Exécution du contrat
- Ne constitue pas une cause de licenciement le seul fait pour un salarié
d’avoir installé sur son ordinateur de travail un logiciel anti-espion,
dès lors que cette initiative ne nuisait en rien à son travail et avait pour
seul but de se prémunir contre un éventuel contrôle, à son insu, de l’employeur
au moyen d’un dispositif permettant de vérifier ce qui était tapé sur son clavier
(CA Nancy 22-7-2016 n° 14/00624).
-
Le salarié qui, informé par la direction de la nécessité de prendre un maximum
de congés payés pendant la période estivale, demande des congés en dehors de
celle-ci, en période de surcroît d'activité, et se voit opposer un refus commet
une faute en critiquant publiquement le directeur des
ressources humaines, en impliquant ses collègues dans un conflit qui ne les
regarde pas, et en se manifestant de manière autoritaire et discourtoise auprès
de l'employeur pour qu'il lui fournisse une attestation de refus de congés en
vue d'obtenir le remboursement des billets d'avion qu'il a achetés avant d'être
autorisé à s'absenter (CA Versailles 7-9-2016 n° 14/04432).
- La mise en œuvre d’une clause de mobilité impliquant pour le salarié,
soit un déménagement de toute la famille dans le mois pour être pris en charge
par l’employeur, avec toutes les complications liée à ce déménagement
(situation professionnelle du compagnon, scolarité des enfants...), soit des
allers et retours quotidiens de 2 heures chacun ou encore l’éloignement de
l’intéressé 5 jours sur 7 couplé avec les frais de location d'un logement sur
le lieu de travail, peut être considérée comme portant atteinte à son droit
à une vie personnelle et familiale après 16 ans de statu quo. Cette
mutation n’étant ni justifiée par la tâche à accomplir, ni proportionnée au but
recherché, tel qu'affiché par l'employeur, le refus opposé par le salarié est
fondé et ne peut donc constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement (CA
Rennes 7-9-2016 n° 13/08413)
Rupture du contrat
- Dès lors que l'employeur n'a pas
informé le salarié que la Direccte avait refusé d'homologuer la
rupture conventionnelle et lui a versé une indemnité de rupture, l'intéressé a
pu, de bonne foi, penser pendant plusieurs mois que son contrat de travail
avait effectivement été rompu. En refusant de réintégrer le salarié malgré ses
sollicitations, l’employeur se rend responsable de la rupture du contrat de
travail qui s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse
(CA Paris 5-9-2016 n° 15/08803).
- La salariée dont le licenciement pour motif économique est nul pour avoir
été prononcé en période de grossesse sans que soit établie
l'impossibilité de maintenir son contrat de travail a droit à des dommages et
intérêts pour nullité du licenciement et au versement des salaires qu’elle
aurait dû percevoir pendant la période couverte par la nullité. La salariée
peut également obtenir réparation d'un préjudice financier
supplémentaire, dans la mesure où elle a connu une période de chômage à
l'issue de son congé maternité, et d'un préjudice moral résultant
de la rupture intervenue pendant une période de sa vie où elle aurait dû
bénéficier de repos et d'apaisement (CA Nîmes 30-8-2016 n° 14/05898).
Représentation du personnel
- Un membre du CHSCT fait un usage de son crédit d’heures conforme
à l’objet de son mandat en assistant à une audience pénale relative à un cas de
harcèlement moral d’une ampleur inédite dans la région, susceptible de parfaire
sa formation théorique en la matière, d’appréhender de manière concrète la
prévention, le repérage et le traitement des situations de souffrance au
travail, auxquelles il était confronté au sein de son entreprise (CA Amiens
16-8-2016 n° 15/01960).
- Dès lors que la société est partie intégrante d'une stratégie globale
définie au niveau du groupe, l'expert-comptable désigné par le comité
d'entreprise en vue de l'assister lors de la consultation sur les orientations
stratégiques de l'entreprise peut réclamer la communication du plan
stratégique du groupe (CA Paris 15-7-2016 n° 15/24432).
Durée du travail
- Pour être valables, les conventions
de forfait jours doivent être conclues en application d'un accord
collectif répondant aux exigences relatives au droit à la santé et au
repos. Tel est le cas lorsque les dispositions de l'accord d'entreprise
assurent la garantie du respect des repos, journalier et hebdomadaire, ainsi
que des durées maximales raisonnables de travail en organisant le suivi et le
contrôle de la charge de travail selon une périodicité mensuelle par le biais
d'un relevé déclaratif signé par le supérieur hiérarchique et validé par le
service des ressources humaines, assorti d'un dispositif d'alerte de la
hiérarchie en cas de difficulté, avec possibilité de demande d'entretien auprès
du service des ressources humaines (Cass. soc. 8-9-2016 n° 14-26.256 FS-PB).
- La seule connaissance par
l'employeur d'une situation de fait créée par ses salariés, à
savoir la mise en place par ceux-ci, de leur propre initiative,
d'un service d'appel téléphonique en dehors de leurs heures de travail, ne
transforme pas cette situation en astreinte (Cass. soc. 8-9-2016 n° 14-26.825
FS-PB).
- La sujétion imposée à un salarié
de se tenir, durant les permanences, dans un logement de
fonction mis à disposition à proximité de l'établissement afin d'être
en mesure d'intervenir en cas d'urgence ne l'empêche pas de vaquer
à des occupations personnelles et ne constitue donc pas une période d'astreinte
(Cass. soc. 8-9-2016 n° 14-23.714 FS-PB).
Statuts ou régimes particuliers
- La commission arbitrale
des journalistes est seule compétente, en cas de
rupture à l’initiative de l’employeur et ce quelle que soit la cause du
licenciement, pour fixer le montant de l’indemnité de rupture due
au journaliste professionnel ayant plus de 15 ans d’ancienneté. Dès lors, le
juge prud’homal n'est pas compétent pour statuer sur l’octroi à un journaliste
d’une indemnité de licenciement, y compris sur le fondement des dispositions
prévoyant, en cas de licenciement fondé sur l'inaptitude physique du salarié,
une indemnité spéciale égale au double de l'indemnité légale
minimale de licenciement ou, si elle lui est supérieure, à l'indemnité
conventionnelle de licenciement (CA Paris ch. 6/9 31-8-2016 n° 15/01648).
- Ne manque pas à son obligation de
loyauté et d’adaptation du poste de travail du salarié handicapé l’employeur
n'ayant pas pu mettre en œuvre le télétravail préconisé par le médecin du
travail en raison des arrêts de travail continus de l'intéressé et du choix de
ce dernier de déménager dans un lieu éloigné, incompatible avec les contraintes
de consultation des pièces comptables et financières sur lesquelles il
travaillait (CA Paris ch. 6/9 7-9-2016 n° 14/06163).